Carte publiée dans l’Atlas du Proche-Orient arabe, PUPS, Paris, 2011

Le 14 décembre 1981, Israël a annexé officiellement le plateau du Golan occupé depuis 1967 par son armée. Cette mesure complique son éventuelle restitution à la Syrie car il faudrait pour cela une majorité des 2/3 à la Knesset ou 65% des suffrages lors d’un référendum. Cette annexion n’est pas reconnue par la communauté internationale qui considère que le Golan est un territoire occupé au même titre que la Cisjordanie et Gaza, mais à la différence des territoires palestiniens qui ne possèdent pas d’Etat, le Golan appartient à un Etat souverain. La population syrienne du Golan a refusé la nationalité israélienne qui lui était proposée et continue de manifester son attachement à la Syrie. Les 5 000 syriens demeurés dans le Golan, sur une population d’environs 80 000 personnes, sont désormais 22 000 en raison d’une démographie de combat. Ils sont confinés dans quatre villages au nord du plateau, tandis que 95% de la superficie du Golan est occupée par 20 000 colons regroupés dans 34 colonies fondées à la place des villages syriens détruits. Mais à la différence de la Cisjordanie la colonisation marque le pas en raison de l’éloignement des grands centres urbains et des craintes sur sa rétrocession à la Syrie même s’il existe un plan ambitieux d’y installer 200 000 colons juifs.

Le Golan-Fabrice Balanche

Le Golan est présenté par Israël comme indispensable à sa sécurité. D’une part ce plateau surplombe le nord d’Israël et constitue une barrière naturelle pour empêcher toute offensive syrienne, par ailleurs les stations de surveillance israéliennes contrôlent le sud de la Syrie. D’autre part le bassin versant du Golan alimente le lac de Tibériade où Israël prélève plus du tiers de sa consommation d’eau. En mars 2000, le premier ministre israélien Ehud Barak et le président syrien Hafez El Assad, semblaient proches d’un accord de paix en échange de la rétrocession du Golan à la Syrie sur le modèle du Sinaï égyptien. Mais les négociations échouèrent essentiellement quant au tracé de la frontière : dix mètres qui donnaient à la Syrie l’accès au lac de Tibériade. Ce détail est capital quant au statut du lac de Tibériade car il en fait un lac international, qui plus est avec la majeure partie de son impluvium en territoire syrien, Israël devrait donc négocier officiellement l’utilisation de l’eau avec la Syrie.

La frontière entre les mandats français et britanniques fut difficile à tracer dans la zone du lac de Tibériade en raison précisément des prétentions sionistes. Les accords Sykes Picot partageaient le lac de Tibériade, puis les accords de 1923 repoussèrent la frontière 10 mètres à l’est du lac afin qu’il soit entièrement en Palestine, ne laissant qu’un droit de pêche et de navigation à la Syrie. Lors de la première guerre israélo-arabe, la Syrie conquit la rive orientale du lac qui devint la ligne d’armistice de 1949. Les zones démilitarisées furent progressivement réoccupées par les belligérants, mais la Syrie conserva la rive Nord-Est du lac de Tibériade jusqu’à l’offensive israélienne du 4 juin 1967 (« guerre des 6 jours ») qui l’amputa du Golan.

La limite revendiquée par Israël pour ses frontières internationales, celle qui est communément appelée « ligne du 4 juin 1967 » car elle précède la guerre des six jours. Cependant lors des négociations de 2000 avec la Syrie, Ehud Barak ne souhaitait négocier que sur la base des frontières de 1923 au grand dam d’Hafez El Assad qui en conclu qu’Israël n’était pas sincère dans sa volonté de paix. Entre la Syrie et Israël, la méfiance est telle que les accords ont peu de chance d’aboutir, ce qui ne fut pas le cas avec l’Egypte ou la Jordanie.

Le Golan est pour la Syrie ce que l’Alsace-Lorraine a pu représenter pour la Troisième République : les hauteurs du Golan se sont la « ligne bleue des Vosges » chères à toutes les générations d’écoliers syriens depuis 1967. En octobre 1973, la reconquête d’une partie du plateau, dont « la ville martyre de Kuneitra », une victoire pour la Syrie qui a contribué à légitimer le régime d’Hafez El Assad par rapport aux baathistes précédents qui avaient perdus le Golan.